En juin 1923 à Hambourg, le Parti communiste organise une grève de marins puis demande en secret à ses militants de faire les jaunes pour augmenter son emprise sur la marine

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Débat parentCet argument est utilisé dans le débat Lénine est-il le précurseur de Staline ?.
Mots-clés : stalinisme, instrumentalisation, grève, cynisme, duplicité, briseurs de grève, intérêts matériels, bureaucratie, URSS, Hambourg, Parti communiste, marins[ modifier ].

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« Je fus convoqué à une réunion secrète dans le port en compagnie de la plupart des agitateurs des docks. Une fois que l’on nous eut fait prêter serment de ne rien divulguer de ce que nous entendrions, un des collaborateurs de Thaelmann donna l’ordre à tous les marins communistes présents à cette réunion d’informer l’Association des armateurs qu’ils étaient prêts à naviguer à bord des bateaux désarmés par la grève. Un murmure de surprise et d’indignation courut à travers l’auditoire. Pour ma part, j’étais extrêmement choqué par cette incroyable duplicité. Comment ! Pas plus tard que le matin, nous avions amené à la grève les équipages de deux paquebots nouvellement arrivés ! L’équipe de propagande d’Albert Walter avait distribué les imprimés aux marins, ces imprimés qui disaient : "Pas de vapeur pour les machines ! Pas de travail sur le pont ! Faites la grève !"

Un cri de protestation se fit entendre derrière moi :

— Nous ne sommes pas des briseurs de grèves, nous ne sommes pas des jaunes !

L’officiel du Parti ne parut pas décontenancé. Il attendit patiemment que nos protestations cessassent. Puis, il expliqua :

— Camarades, le Parti attend beaucoup de vous. Il veut votre coopération dans une manœuvre tactique qui doit faire pénétrer le bolchevisme plus solidement dans la marine marchande. La grève ne peut durer toujours. Devons-nous laisser à ces requins d’armateurs la possibilité de se venger de nous en excluant désormais les communistes des équipages de leurs bateaux ? Devons-nous laisser leurs bateaux partir sans essayer de faire de chacun d’eux une citadelle du Parti ? Non. Nous devons donc tirer davantage de notre force présente pour l’augmenter afin de nous trouver prêts quand, demain, les grandes batailles auront lieu. Nous ne sommes pas une foule de sourds-muets. Nous sommes des communistes. La discipline du Parti exige que vous suiviez, que vous obéissiez à ces ordres. C’était extrêmement dur, sans aucun doute. C’était comme plonger un couteau dans le dos de nos camarades, ces marins et ces chauffeurs qui avaient eu confiance et qui avaient répondu à notre ordre de grève. Mais pour nous, communistes, la fidélité au Parti l’emportait sur celle que nous avions vouée au prolétariat. Ainsi, cependant que tous les comités d’action, dans de vibrants manifestes, exhortaient les marins à continuer la grève, des bateaux montés par des équipages communistes quittèrent le port à l’aube comme si de rien n’était. »

Jan Valtin, Sans patrie ni frontières, Paris, 1947.

RéférencesRéférences

Arguments pourJustifications

Arguments contreObjections

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